lundi 10 novembre 2008

Politique étrangère : que peut changer Obama ?

Le succès d'Obama à l'étranger a fait naître des espoirs immenses sur l'évolution de la politique étrangère américaine. Une fois l'"Obamania" des premiers mois retombée, quels seront les défis qui attendent le nouveau président ?

Avec Barack Obama à la Maison-Blanche après huit ans de gestion républicaine, les regards se portent sur une nouvelle politique économique et sociale de Washington, mais également sur de nouvelles orientations en matière de politique étrangère.

Sur ce point, quelles sont les changements à attendre, quelle marge de manœuvre, et surtout quels effets ? Entre modification de l’image de Washington sur la scène internationale et changements profonds, les spéculations vont bon train sur les effets à long terme de l’arrivée à la Maison Blanche du candidat démocrate.

Une meilleure image de Washington sur la scène internationale

On ne le répétera jamais assez, Barack Obama bénéficie d’une image exceptionnelle sur la scène internationale. Sa tournée triomphale en Europe en juillet dernier, son immense popularité en Afrique, en Asie, en Amérique latine et au Moyen-Orient en ont fait dès le début des primaires démocrates le candidat préféré des non Américains.
Les raisons : le rejet de l’administration Bush bien sûr, qu’Obama incarne comme Kerry l’avait fait avant lui en 2004, mais aussi son profil. Un président métis, avec un beau-père indonésien, et des slogans rassembleurs. Pour la première fois depuis Bill Clinton, de manière plus nette encore, et contrairement à 2004, le vote des Américains est en phase avec l’opinion publique internationale.

Obama a compris très tôt que l’un des principaux défis de Washington sur la scène internationale est de redorer son image, fortement ternie par la politique étrangère de l’administration Bush. Avec Obama comme président, les Etats-Unis ne seront plus perçus comme un empire, mais redeviendront la puissance bienveillante qu’ils étaient au sortir de la Guerre froide, et dans une certaine mesure au lendemain des attentats du 11 septembre 2001.

Entre modifications profondes…

Sur différents sujets de politique étrangère, Barack Obama a annoncé de profondes modifications. On pense bien sûr à l’Irak, dont il a promis le retrait rapide des forces américaines et le transfert de la sécurité aux autorités irakiennes. On pense à l’Afghanistan, où il souhaite renforcer la présence militaire pour combattre Al-Qaïda et revenir aux objectifs initiaux de la guerre contre le terrorisme.

Des sujets sur lesquels son programme s’inscrit en rupture avec l’administration Bush, et annonce de profondes modifications. Il souhaite également privilégier le dialogue non seulement avec les alliés traditionnels de Washington, mais également avec ses adversaires, ce qui le distingua d’ailleurs nettement de John McCain, et lui valut de vives critiques du camp républicain, raillant sa naïveté et son inexpérience.

Enfin, il semble plus ouvert au dialogue sur les questions énergétiques et environnementales, et s’il a inscrit ces thèmes dans son programme de politique intérieure, cela pourrait également se traduire par une plus grande implication de Washington sur ces dossiers à échelle internationale.

Sur ces différents sujets enfin, Barack Obama disposera d’une majorité dans les deux chambres du Congrès, ce qui lui permettra d’avoir les mains plus libres, et de ne pas avoir à faire face à une opposition en ordre serré. Sa capacité à rassembler le camp démocrate lors des élections lui sera à cet égard précieuse. Après avoir surmonté son manque d’expérience par une vision claire des relations internationales, il pourrait profiter du contrôle par son parti de l’Exécutif et du Congrès pour mettre en application son programme.

…et simple effet d’annonce

Cependant, ces modifications tant annoncées semblent se référer à l’héritage de la première administration Bush, auxquelles elles s’opposent clairement, mais ne tiennent pas compte des changements très nets amorcés dans la seconde, et Barack Obama pourrait finalement s’inscrire dans la continuité de la politique étrangère menée par Condoleezza Rice depuis 2005, privilégiant un plus grand pragmatisme et un rapprochement avec les alliés traditionnels de Washington.

Ses positions sur l’Iran et la Corée du Nord, qui privilégient le dialogue, sont ainsi en phase avec la Secrétaire d’Etat sortante. Le souci de ne plus provoquer de crise avec les alliés comparable à celle de 2003 est également très présent chez lui, comme il l’était chez John McCain, ce qui nous invite à penser que sur la plupart des grands dossiers internationaux, Barack Obama maintiendra le cap, et n’amorcera pas de rupture fondamentale, et au-delà de l’image, la politique étrangère américaine restera sensiblement la même que celle que mena Madame Rice au cours des quatre dernières années.

Quel avenir pour l’Obamania hors des Etats-Unis ?

Passée l’euphorie de l’Obamania, et devant les difficultés à modifier en profondeur la politique étrangère américaine au-delà des discours, peut-on dès lors s’attendre à une vague de déception hors des Etats-Unis à l’égard dentes sont immenses, à l’intérieur des Etats-Unis comme à l’extérieur, et les déceptions seront d’autant plus grandes si les changements ne sont pas spectaculaires. Devant les difficultés à appliquer à la lettre son programme de politique étrangère, notamment en raison des impératifs sur les questions économiques et sociales, Barack Obama pourrait ainsi être l’objet de critiques sur le non respect de ses engagements en Irak ou en Afghanistan, et ses détracteurs ne manqueront pas de le comparer à l’administration sortante.

Le défi pour la future administration, en matière de politique étrangère, est donc plus grand que jamais.

(Source : ilovepolitics.info, rédigé par Barthélémy Courmont, chercheur à l'IRIS, en partenariat avec contre-feux.com)

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